Beachbrother vous donne rendez-vous tous les mois pour une rubrique consacrée à la préparation mentale, en partenariat avec Noé Grandotto, préparateur mental et coach. Les thèmes proposés s'adresseront aux surfeurs de tous les niveaux, pour comprendre à quoi sert la préparation mentale, et surtout, comment l'utiliser pour améliorer son surf.
Si le terme d'erreur est si courant dans le surf (« erreur de placement, de choix de vague, de timing etc. »), encore plus dans les interviews des entraîneurs ou des surfeurs eux-mêmes, pourquoi la craignons nous tant ?
" L'erreur est intimement liée à la représentation que l'on peut s'en faire. Une erreur faible pour une personne peut être vue comme une erreur grave pour une autre. L'erreur est également liée au processus d'apprentissage. Dans notre vie, que ce soit dans le surf ou pas, nous faisons des erreurs. Les erreurs faibles, très fréquentes au quotidien, et qui sont dues à de légères pressions nous font sortir de notre zone de performance. Nos erreurs sont en quelque sorte des régulations de notre surf qui nous permettent de nous adapter, de mieux nous connaître et de réaliser ainsi des progrès permanents.
Deux modes de fonctionnement à connaître
Lorsque je travaille sur le long terme avec des surfeurs j'utilise très souvent les recherches et les méthodes de Jacques Fradin, Directeur de l'institut de médecine environnementale et intervenant auprès des étudiants en préparation mentale. L'erreur est une base primordiale sur laquelle il va falloir travailler, encore plus dans le surf de gros où l'enjeu est encore différent. Généralement une peur de l'erreur ou une trop grande fixation sur un possible échec du résultat attendu implique une réaction très connu : le stress ! Les recherches en neurosciences montrent que le stress est un signal d'erreur qui dénonce une menace pour l'intégrité du raisonnement : une incohérence interne. Ces mêmes recherches ont montré que nous avons deux modes de fonctionnement lorsque l'on se prépare à une action. Soit nous utilisons un mode dit «automatique » soit un mode dit « adaptatif ». Lorsque l'on est dans le peur de l'échec ou bien sur une trop grande fixation sur le résultat nous déclenchons du stress qui nous indique que nous sommes dans le mode automatique.
Il faut donc apprendre à changer de mode. En changeant de mode de fonctionnement on apprend au fur et à mesure ce qu'est l'erreur, à la découvrir et pourquoi pas à l'aimer. Pour Jacques Fradin si l'erreur est incontournable et inévitable il nous faut donc bien vivre avec. Mais les études montrent des éléments qui vont changer les méthodes de préparation mentale : nous apprenons plus dans l'erreur que dans le succès. Attention : il est primordial de travailler sur les qualités, les points de réussite de façon très régulière et je bannis les pédagogies de l'échec menées par les entraîneurs. Il ne faut pas tout confondre. Au contraire ce qu'il faut retenir c'est que puisque nous allons faire des erreurs et connaitre des échecs il faut apprendre à le gérer !
L'artiste et sa relation intime avec l'erreur
En chaque surfeur sommeille un artiste. Le surfeur s'entraîne, l'artiste réalise ce qu'il faut au moment voulu pour décrocher le Graal. L'artiste c'est ce surfeur capable de réaliser le geste parfait, c'est ce surfeur qui une fois lancé n'a aucune crainte de tomber ou d'échouer car il sait au fond de lui que chaque expérience lui permettra de devenir plus fort ! Il accepte le fait que l'on puisse échouer, il sait que ce qui bloque les chances de succès dans l'action est bien souvent le stress généré par la peur ou le refus du risque. Il est incohérent pour notre cerveau de vouloir réaliser une action sans prendre de risque et de considérer que l'erreur est possible ! Notre meilleure chance de réussir est donc d'apprendre à notre cerveau à imaginer les choses autrement lorsque l'on va surfer. Il faut s'entraîner afin de s'ouvrir à de nouvelles opportunités.
Se donner le droit à l'erreur…
C'est une manière de réussir. Dans ce processus de dysfonctionnement de nos états mentaux, il peut arriver que nous ne nous donnions pas le droit à l'erreur alors que celle-ci est parfois inévitable. Accepter que l'erreur fasse partie de la vie est un premier point d'ancrage pour travailler durablement et apprendre les outils nous permettant de le gérer. Nous ne pouvons pas supprimer l'erreur, en revanche accepter que l'on puisse faire des erreurs et savoir les gérer est essentiel. Finalement, nous pourrions même voir l'erreur comme un atout et établir une relation avec elle, certes difficile mais en ayant conscience qu'elle est notre moyen de progresser sur le long terme.
… Et bien plus !
Un coach mental, un préparateur mental formé à ces techniques peut permettre au surfeur de gérer son stress, d'optimiser la bonne attitude dans l'eau et souvent cela passe par la gestion de l'erreur, même si au départ le surfeur n'en a pas réellement conscience. Vous trouverez des informations plus détaillées sur mon site en préparation mentale, mais je terminerai ce petit billet en parlant d'une technique. Celle-ci permet d'apprendre à voir les choses autrement.
Pour Jacques Fradin nous ne sommes pas habitués à s'entraîner dans le sport en utilisant une nouvelle manière de penser, en réinventant la relation que l'on a de l'échec et du succès. Pour pas mal de surfeurs que j'ai accompagnés je me suis rendu compte qu'ils parlaient tout le temps de ces deux aspects en les opposant littéralement. Pourtant apprendre à gérer ses erreurs en utilisant des outils et techniques de préparation mentale est une grande évolution dans le niveau de performance. Si, vous l'avez compris, nous apprenons dans l'erreur cela veut dire qu'il y a bien des avantages à se retrouver dans une situation non souhaitée ! S'il est difficile pour beaucoup de penser ainsi, avec le temps et de l'entraînement on peut changer notre façon de voir les choses et la vitesse de progression se fait ressentir de façon incroyable. Essayez donc de déterminer en surf une situation souhaitable et, à l'opposé, celle qui est non souhaitable. Notez (même si c'est difficile au départ et même si ce sont des idées extravagantes) pour chaque situation les avantages et les inconvénients. Cet outil mis en place suite au recherche de Jacques Fradin est très puissant dans le temps et nous permet de voir le monde autrement. Il y a une germe de succès dans chaque échec et une germe d'échec dans chaque succès ! Cela redistribue les cartes et vous permet de travailler plus sereinement dans vos entraînements."
Pour plus d'informations, vous pouvez contacter Noé Grandotto par email (noe.grandotto@gmail.com) ou visiter son site web consacré à la préparation mentale.
Crédits photo © WSL / Poullenot/Aquashot