Nouvelle saison, nouvelle destination, nouvelle expédition Odisea.
Après le Grand Nord avec l'Alaska, Mathieu Crépel et Damien Castera se sont envolés il y a deux semaines vers le Grand Sud avec la Patagonie Chilienne.
Après l'ascension du volcan Osorno , la descente en packraft du rio Petrohue, et la découverte de l'île de Chiloe, les voici au royaume d'Araucanie :
" Suite à une succession de tempêtes martelant l'île de Chiloe, nous avons décidé de tenter notre chance un peu plus au Nord. Avec cette minutie propre au géographe, qui fouille dans les paysages pour en révéler sa substance, nous avons arpenté chaque crique, chaque pointe rocheuse pour débusquer la perle rare, l'objet de tous nos rêves : une vague sans fin, déroulant dans une crique silencieuse à l'abri des regards. Une sorte de royaume en paix pour un rêve un peu égoïste, celui de surfer seuls.
Durant l'hiver austral, les dépressions se forment aux abords de l'Antarctique et remontent le long du continent Sud Américain. Comme en Afrique occidentale, un courant froid remonte les latitudes, propice au développement et à la diversité de la vie aquatique. Benguela en Namibie, Humbolt au Chili, permettent la prolifération de milliers de mammifères marins, baleines, lions de mers, phoques… Un paradis naturel jusqu'alors épargné grâce à la rudesse du climat. Pour les spots de surf, c'est un peu la même chose. Ce courant froid nous permet de côtoyer davantage de compagnons à nageoires que de compatriotes bipèdes. Et les vagues se révèlent d'une intensité extrême pour qui sait chercher. C'est un peu l'Eldorado des gauchers, le trésor des rois d'Araucanie. Une succession de pointes rocheuses sur 4000 km de côtes assurent le bonheur des surfeurs d'eaux froides. Lorsque les vents sont bons, prédominance Sud/Sud-Est, nous passons nos journées à l'eau et sortons à la nuit tombée, transis de froid. Quand le temps est défavorable, obscures tempêtes nimbées de mystères, nous restons à l'abri dans nos sacs de couchage.
Privés d'évasion par l'orage, c'est par la littérature que nous prenons la clé des champs. J'embarque alors avec Magellan sous la plume de Stefan Zweig, et entreprend le plus grand voyage d'exploration avec ces hommes courageux qui découvrent le passage tant convoité et la terre de feu. Les feux étaient ceux des indiens fuegiens. Selon une des versions de l'origine de cette dénomination, Magellan n'ayant aperçu que de la fumée l'avait appelée Tierra del humo, terre de fumée, mais Charles Quint déclara qu'il n'y avait pas de fumée sans feu et changea de nom. Aujourd'hui les indiens ont disparu, les feux se sont éteints, il ne reste plus que les légendes.
En gagnant l'océan, nous arrivons à la fin de notre aventure « du flocon à la vague ». L'oeil un peu triste cherche le réconfort dans les promesses de l'aube. Les souvenirs du voyage se bousculent. Le temps d'un dernier surf, où comme par magie des dizaines de phoques nous entourent pour nous accompagner sur la dernière vague.
Lorsque l'on suit le chemin de l'eau, on se rend compte que la vie a soudain de grands territoires devant elle..."
Damien et Mathieu